Les Caraïbes en con-finement!

Bah oui parce que c’est tellement con d’être ici et de ne pas pouvoir en profiter.. finement….
Cela dit on ne va pas se plaindre. Nous sommes pleinement conscients de notre chance de pouvoir encore bénéficier d’un petit morceau de liberté de mouvement dans ce p’tit bout du monde .
Je fais le point sur la situation d’aujourd’hui aux Antilles. Je dis aujourd’hui car les mesures qui touchent les îles évoluent jours après jours. Toutes les îles se sont fermées les unes après les autres (Martinique et Guadeloupe parmi les 1ères) avec des directives fluctuantes d’une île à l’autre: certaines îles n’autorisent plus les déplacements à terre, d’autres seulement pour l’avitaillement et d’autres sont un peu plus souples, enfin pour le moment…
Aujourd’hui donc nous sommes toujours sur le territoire d’Antigua et Barbuda. Nous avons quitté Barbuda le 25 mars pour aller vite faire notre ravitaillement alimentaire sur la côte Ouest d’Antigua juste avant que celle-ci ne ferme ses portes aux navires le 28 mars (c’était le dernier état des Caraïbes ouvert…). Un couvre feu vient d’être mis en place de 20h à 6h du matin mais pour l’instant on peut toujours aller à terre. Nous sommes soumis aux mêmes règles de distanciation et d’hygiène que partout ailleurs. Cela dit une fois nos corvées de ravitaillement terminées (bouffe, boissons, gaz, eau, gasoil, charbon.. T’inquiète pas Maman, on a de quoi tenir 2 mois!) nous envisageons de retrouver nos appartements de confinement à Great Bird Island au Nord Est d’Antigua pour nous isoler sur cet îlet non habité.

 

« Guerre sanitaire, confinement, couvre feu, gestes barrières, rationnement »..
Je pense à nos enfants qui grandissent dans ce contexte si particulier entre les mises en confinement dans les écoles liées aux attentats et le confinement présent lié au coronavirus. Génération immergée dans tous ces termes tellement oppressants…
Mais aussi « aujourd’hui, pour l’instant, pour le moment, »… autant de mots qui nous ramènent à l’instant présent.
Dans tout ce tohu-bohu de doute et d’incertitude, l’heure est actuellement au partage: il n’y a qu’à voir l’émergence de textes, de chansons, de vidéos, d’appels, d’idées novatrices… tant de belles initiatives qui fleurissent via le net pour s’occuper et garder le moral durant cette période. Le confinement a développé un vaste réseau qui répond au besoin de se rapprocher des autres, une vague virtuelle de solidarité qui se répand inondant le monde réel. Ce besoin vital de se sentir relié au monde lorsque les frontières se ferment et que celui-ci nous échappe.

Je partage justement un texte présentant la situation vue de loin. Un trait d’esprit qui laisse la porte ouverte à la réflexion sur nos modes de vie et de consommation.. et leur impact à plus ou moins long terme sur notre environnement, notre planète, celle de nos enfants!

Moustapha Dahleb  la plus belle plume tchadienne, a écrit :

« L’HUMANITÉ ÉBRANLÉE ET LA  SOCIÉTÉ EFFONDRÉE PAR UN PETIT MACHIN.

Un petit machin microscopique appelé coronavirus bouleverse la planète. Quelque chose d’invisible est venu pour faire sa loi. Il remet tout en question et chamboule l’ordre établi. Tout se remet en place, autrement, différemment.

Ce que les grandes puissances occidentales n’ont pu obtenir en Syrie, en Lybie, au Yemen, …ce petit machin l’a obtenu (cessez-le-feu, trêve…).

Ce que l’armée algérienne n’a pu obtenir, ce petit machin l’a obtenu (le Hirak à pris fin).

Ce que les opposants politiques n’ont pu obtenir, ce petit machin l’a obtenu (report des échéances électorales. ..).

Ce que les entreprises n’ont pu obtenir, ce petit machin l’a obtenu (remise d’impôts, exonérations, crédits à taux zéro, fonds d’investissement, baisse des cours des matières premières stratégiques. ..).

Ce que les gilets jaunes et les syndicats  n’ont pu obtenir, ce petit machin l’a obtenu ( baisse de prix à la pompe, protection sociale renforcée…).

Soudain, on observe dans le monde occidental le carburant a baissé, la pollution a baissé, les gens ont commencé à avoir du temps, tellement de temps qu’ils ne savent même pas quoi en faire. Les parents apprennent à connaître leurs enfants, les enfants apprennent à rester en famille, le travail n’est plus une priorité, les voyages et les loisirs ne sont plus la norme d’une vie réussie.

Soudain, en silence, nous nous retournons en nous-mêmes et comprenons la valeur des mots solidarité et vulnérabilité. 

Soudain, nous réalisons que nous sommes tous embarqués dans le même bateau, riches et pauvres. Nous réalisons que nous avions dévalisé ensemble les étagères des magasins et constatons ensemble que les hôpitaux sont pleins et que l’argent n’a  aucune importance. Que nous avons tous la même identité humaine face au coronavirus.

Nous réalisons que dans les garages, les voitures haut de gamme sont arrêtées juste parce que personne ne peut sortir.

Quelques jours seulement ont suffi à l’univers pour établir l’égalité sociale qui était impossible à imaginer.

La peur a envahi tout le monde. Elle a changé de camp. Elle a quitté les pauvres pour aller habiter les riches et les puissants. Elle leur a rappelé leur humanité et leur a révélé leur humanisme.

Puisse cela servir à réaliser la vulnérabilité des êtres humains qui cherchent à aller habiter sur la planète mars et qui se croient forts pour clôner des êtres humains pour espérer vivre éternellement.

Puisse cela servir à réaliser la limite de l’intelligence humaine face à la force du ciel.

Il a suffi de quelques jours pour que la certitude devienne incertitude, que la force devienne faiblesse, que le pouvoir devienne solidarité et concertation.

Il a suffi de quelques jours pour que l’Afrique devienne un continent sûr. Que le songe devienne mensonge.

Il a suffi de quelques jours pour que l’humanité prenne conscience qu’elle n’est que souffle et poussière.

Qui sommes-nous ? Que valons-nous ? Que pouvons-nous face à ce coronavirus ?

Rendons-nous à l’évidence en attendant la providence.

Interrogeons notre « humanité » dans cette « mondialité » à l’épreuve du coronavirus. 

Restons chez nous et meditons sur cette pandémie. 

Aimons-nous vivants ! »

Et puis je pense aussi à toutes ces personnes qui continuent à oeuvrer pour les autres malgré le risque et la fatigue.. Fred, Fanny et tous les héros du quotidien, on pense à vous! On vous envoie plein d’amour à diffuser largement!!


De notre côté, le réseau passe via le 72. C’est la fréquence qu’on utilise à la VHF pour communiquer avec nos complices de Speedy plus Thomas et Marine de Cassiopée. C’est ce canal qui nous relie à nos compagnons de confinement: nos 3 bateaux se suivent et se soutiennent depuis maintenant 2 semaines pour Cassiopée et plus de 3 semaines pour Speedy. Dès le matin on allume la radio et on se branche sur le canal 72 pour s’informer les uns les autres du programme de la journée et de nos petits sauts de puce autour de Jolly Harbour le point central pour toutes nos courses.
Pas grand chose de nouveau à raconter. Nos journées se rythment avec les mêmes rituels que d’habitude: petit dej, vaisselle puis école. Apéro. Repas. Balade sur la plage (pour l’instant autorisée sur Antigua). Apéro. Repas arrosé!
Heureux, les enfants font l’école à tour de rôle sur Manutea ou Speedy. Cet échange aère aussi grandement l’esprit des parents!
Selon l’endroit où l’on se trouve, j’initie mes copines navigatrices au yoga sur les ponts des navires ou sur des plages désertes.
Certains équipages dépendent des boats boys pour leur avitaillement, d’autres inventent «l’apéro annexe» pour éviter le contact mais partager tout de même un moment de convivialité.
L’île regorge essentiellement de bateaux américains ou canadiens et l’accueil de notre arrivée dans les mouillage est inégal: on se fait jeter, engueuler, filmer.. mais parfois on a tout de même droit à un large sourire!

Dernière nouvelle: notre smartphone vient de rendre l’âme et ça nous complique un peu la vie pour communiquer. On bidouille avec celui qu’Alice nous a prêté pour les appels et avec notre tablette pour les messages WhatsApp. N’hésitez pas à nous faire un retour sur le blog pour nous donner des nouvelles.

Sinon il nous reste les lambis pour vous joindre à l’ancienne! 

Pas sûr que la connexion passe bien pour la France!!

❤️❤️Et puis surtout, Prenez soin de vous!❤️❤️

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6 commentaires pour Les Caraïbes en con-finement!

  1. Le texte est magnifique et votre récit de confinement met du baume au coeur ! Merci Daniel et Virginie 😉

  2. Dumontier dit :

    Encore un beau récit tant attendu. Il est vrai que nous nous posions la question « mais que deviennent-ils et comment s’organisent-ils face à ce terrible virus ? »
    Tu nous donnes les réponses. Ici en Europe autant dire que ce n’est pas facile. L’Espagne et l’Italie enterrent leur dizaines de milliers de défunts. En France on est un peu en dessous et nous sommes très inquiets. Protégez vous.
    Philippe et Aurèle.

  3. sarahvaugane dit :

    On est heureux de vous lire en ces temps troublés et de vous savoir « pour le moment » encore un peu préservés des restrictions sur terre… le texte de Mustapha devrait entrer dans les écoles ! Ce serait une très belle introduction à la réflexion de notre monde et au devoir d’humilité ! Merci beaucoup et prenez soin de vous pour encore des jours et des lunes… 😍. Gros bisous du pays cauchois
    Aurèle et Philippe

  4. Ana&Sorin dit :

    Dear friends, a pleasure to read your thoughts…keep happy and safe! Lots of love from us here, in NZ…

  5. Schlieper André dit :

    Salut les copains, on voit que vous n’êtes pas trop malheureux et seuls, ça nous rassure, vu la couleur de l’eau on aimerait bien être Confinés la aussi, car pour nous l’environnement n’est pas le même… Odeurs, égouts qui se déversent dans la mer, détritus, plastiques recouvrent, celle qui fut, l’une des plus belles plages de sable blanc de Dakar. On est bloqué là et on attend…prenez soin de vous tous. Donnez nous votre numéro on essaiera de se faire un petit Skype dans la mesure du possible. Gros gros bisous on pense à vous ❤️

  6. Fai Tira dit :

    Ola les amis ! Voila une journée qui commence bien …
    Même si elle a déjà démarré depuis plusieurs heures déjà, de vous lire est ressourçant et signe d’espoir en ces temps maurose où même le plaisir d’un déjeuner dominicale au Frioul ou dans les calanques nous est interdit !
    De notre côté nous avons beaucoup souffert de cette ambiance délétaire qui a touché le monde en générale mais aussi notre entreprise lors des deux premières semaines de confinement.
    Les choses rentrent petit à petit dans l’ordre, les gens se calment progressivement et c’est tant mieux puisque nous étions au bord de la véritable crise de nerf…
    On commence à nouveau à respirer dormir et travailler noramalement malgré les nouvelles contraintes de distranciation, de port de masque et de gants au travail !
    On serre les dents et on avance mais on se languit notre tour pour lacher les affaires courantes et naviguer …
    Ce texte, lu ce matin et cette intervalle pour vous répondre font le plus grand bien, les photos des bateaux sur l’eau turquoise, celles du sable blanc, cet imaginaire d’apéro annexe de yoga sur les ponts et d’école sur les bateaux ravivent nos journées et apaisent nos doutes …
    MERCI bon vent et prenez soin de vous !!
    PS: Nous vous avions envoyé un petit message avec une photo l’autre soir resté sans réponse mais on en connait maintenant la raison et nous sommes donc rassurés !

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